Créer un système de santé plus juste et équitable qui va au delà des tabous et des stéréotypes !

#Insurtech : rencontres avec ceux et celles qui réinventent l’assurance ! Echanges avec les fondateurs et fondatrices d’Insurtech qui réinventent et transforment l’assurance sur l’ensemble de la chaîne de valeur.

C’est parti pour 10 questions à Claire Trescartes, CEO de Lola Health

Quels sont les points clés de votre parcours et que représente l’entrepreunariat pour vous ?

J’ai fait des études en science politique puis en entrepreunariat, puis j’ai travaillé dans l’industrie dans le packaging de luxe en innovation et en growth hacking chez Dropcontact à Station F où j’ai découvert le monde startup.

Je pense que le moment de « basculement » dans mon parcours a été la découverte que mon arrière-grand-père était un inventeur de talent. J’ai eu entre les mains un brevet datant de 1929 certifiants que Léopold Trescartes était le créateur de l’amortisseur. C’était fou ! Savoir qu’un membre de ma famille a participé aux grands progrès de son époque m’a éveillé. Malheureusement, il n’a pas pu protéger ses inventions… Son histoire m’a donné envie de poursuivre dans cette voie, mais de ne pas commettre les mêmes erreurs. L’entrepreunariat représente la possibilité d’avoir un impact significatif sur la vie de milliers voire de millions de personnes. C’était évident, pour moi, de créer quelque chose avec un impact positif sur le monde et c’est la tête pleine d’idées que je suis rentrée dans le master X-HEC qui m’a aidé à concrétiser mes ambitions.

Comment est né votre projet, comment l’idée est-elle venue ?

Après un parcours de soins plutôt chaotique (pour des pathologies féminines), j’ai réalisé que toute une palette de soins n’était pas ou peu considérée dans la société et dans le système de santé. C’est le cas sur la santé des femmes (endométriose, maternité, SOPK (syndrome des ovaires polykystiques, etc) mais aussi sur des postes de soins considérés comme tabous chez les hommes comme l’intimité et la sexualité. Même phénomène sur la manière de se soigner, la population souhaite de moins en moins utiliser des médicaments et se dirige vers des traitements « naturels » avec la médecine douce.
Enfin, je suis persuadée que notre génération est profondément anxieuse quant à l’avenir ,ce qui entraîne des risques psychologiques encore très mal pris en compte par le système de santé.                                                                                                                                Il y avait donc des « trous dans la raquette », comme j’aime à le dire, et l’assurance nous a semblé le moyen le plus efficace pour offrir un support financier dans ces domaines, en plus des postes de soins classiques.

Quelle est votre proposition de valeur ?

Lola Health est une entreprise à mission et ambitionne de construire un système de santé plus juste et équitable.

Nous sommes les premiers à réinventer les grilles de garanties pour qu’elles correspondent bien mieux aux réalités de la société actuelle.

Une aubaine pour les entreprises qui peuvent proposer une mutuelle inédite à leurs collaborateurs tout en valorisant leurs engagements sociaux (pour des labélisations ou des reportings RSE).

Nous avons connu la transformation digitale, puis écologique. Nous nous dirigeons aujourd’hui vers la transformation sociale des entreprises. Il est urgent et stratégique de construire des entreprises transparentes où les collaborateurs trouvent vraiment du sens. Avec Lola Health les entreprises peuvent prouver aux salariés leur rôle de coach qui écoute leurs besoins les plus intimes.

Quelle est votre cible de clients (BtoC, BtoB, BtoBtoC) ? Combien visez-vous de clients d’ici 3 ans ?

Nous avons d’une part une cible de clients B to B : nous vendons aux entreprises qui ont l’obligation légale de proposer une mutuelle santé à leurs collaborateurs. Nous leur permettons de faire d’une obligation légale, un vrai outil d’engagement social.

Nous avons aussi une cible B to B to C : nous vendons des produits de sur-complémentaires santé directement aux salariés qui ont besoin d’une couverture plus complète.

Nous sommes encore une toute jeune entreprise sur le marché et nous privilégions la sortie de nos outils technologiques avant de nous développer davantage sur des PME et ETI plus importantes. Nous envisageons de cannibaliser le marché de l’impact (associations, entreprises à mission, entreprises labellisées, …) d’ici 2 ans pour véritablement associer notre mission sociale à notre développement.

Quel est votre « business model » ? Avez-vous fait évoluer celui-ci ? A quelle date serez-vous à l’équilibre ?

Nous sommes sur un modèle MGA, nous avons délégué la gestion des sinistres à notre partenaire Axa et nous gardons la relation client captive. Nous partageons la cotisation avec Axa sur chacun de nos contrats.

Ce modèle permet d’offrir aux entreprises clientes chez Lola Health de la solidité d’un grand groupe avec l’innovation et l’expérience utilisateur d’une startup.

Nous sommes persuadés que les modèles d’assureurs avec agrément ne sont pas les plus pertinents aujourd’hui.

Nous ambitionnons d’enrichir le développement de notre plateforme afin de vendre des services additionnels liés à notre mission sociale pour atteindre la rentabilité d’ici 3 ans.

Quelles sont les 3 principales difficultés rencontrées dans votre vie d’entrepreneur au sein de Lola Health?

Tout d’abord, se faire confiance, sans nul doute. Etre bien accompagnée est précieux, mais c’est aussi un risque car chacun (e) vous expose sa vision et ses propres convictions. Cela peut donner le sentiment d’être une girouette qui change d’avis au gré des conseils apportés, ce qui est frustrant.

Ensuite, savoir être patiente, ce que je ne suis pas😉. Pour avoir des résultats il faut choisir ses batailles et se laisser le temps opérationnel pour que cela prenne. Nous avons tellement d’idées, nous aimerions parfois tout faire ce qui n’est pas possible.

Et enfin, recruter et retenir les talents. Croire qu’on peut construire une entreprise sans le travail acharné d’une équipe engagée est utopique. En plus de nos propres tâches, il faut passer du temps avec chacun (e) des collaborateurs (rices) pour les former, les soutenir, leur montrer que leur travail a un impact sur la vie de l’entreprise et parfois aussi réussir à les réengager si ils ne le sont plus. Si on échoue humainement en interne, on aura échoué sur tout.

3 difficultés principales rencontrées : se faire confiance, savoir être patiente, recruter et retenir les talents.

Quels sont selon vous les 3 facteurs clés pour la réussite de Lola Health?

En premier lieu, prouver nos engagements sociaux et leur impact.

Ensuite, réussir à développer la distribution et arriver à atteindre un volume suffisant d’adhérents.

Enfin, développer des outils technologiques disruptifs en termes de prévention.

J’en rajouterais un dernier clé : s’entourer d’une équipe plus experte que vous-même en qui vous pouvez avoir confiance.

3 facteurs clés de réussite : prouver nos engagements sociaux et leur impact,  développer la distribution, développer des outils de prévention disruptifs et …  s’entourer d’une équipe experte et de confiance.

Et si c’était à refaire ?

C’est encore un peu tôt pour imaginer ce que nous aurions pu faire autrement… Mais nous avons eu une option : lever de l’argent et tout investir dans la technologie, puis une fois prêt faire de l’acquisition ou mener ces deux chantiers de concert. Nous avons opté pour l’option deux, car nous voulions apprendre de notre marché et seul l’avenir nous dira si nous avons pris la bonne décision !

Quelle est votre vision de l’évolution du secteur de l’assurance et le rôle de l’insurtech  ?

Je pense que l’assurance est globalement mal perçue par la population alors même que c’est un outil de protection et d’étalement de paiement très utile en cas de coups durs. Le principe même de mutualisation est assez noble mais a eu tendance à perdre de ses lettres de noblesse.
L’assurance, comme tous les secteurs, va devoir devenir de plus en plus transparente et (re)devenir citoyenne. Elle va se moderniser car elle est restée dans sa zone de confort trop longtemps. Ces grands acteurs traditionnels vont s’accoler aux insurtechs pour cela car ils n’ont pas la force d’innovation des startups.

Je pense que le plus gros risque pour ces deux types d’acteurs (les traditionnels et les nouveaux arrivants tech) est de bien gérer leurs égos. Croire que les nouveaux arrivants peuvent renverser des géants seuls est utopique et penser pouvoir innover seul, sans les insurtechs, serait une grave erreur.

Nous entrons dans une ère de co-construction, ceux qui seront prêts à s’ouvrir aux autres seront les grands gagnants.

Quelles sont les sociétés insurtechs ou autres start up qui sont vos modèles (les 2 ou  3 clés) en France ou dans le monde ?

Alors tout d’abord, la startup Front, de Mathilde Collin pour son beau parcours jusqu’à San Francisco. Ensuite, Each One pour la beauté et l’ingéniosité de la mission sociale de l’entreprise. Enfin Linkedin car ils ont réussi à me rendre complètement « accro » à leur réseau social, ils sont trop forts.

Mais plus que les startups, ce sont les parcours de vie qui m’inspirent : celui de Simone Weil (un classique, mais tellement inspirante), Daw Aung San Sur Kyi (figure de l’opposition et prix Nobel de la paix), Alyson J Mc Gregor (pionnière de la médecine de genre).

 

Et en bonus…

Racontez-moi une anecdote amusante en lien avec Lola Health?

Quand on a fait notre premier financement participatif nous n’avions pas compris que la plateforme permettait de préremplir la cagnotte. J’ai passé 7h à créer un « fake site » Ulule pour le faire ! Si un jour leur site crash je peux leur donner le mien ! 😉

Pourquoi avoir choisi ce nom pour votre insurtech ?

Au départ nous l’avions pris un peu au hasard car c’était un nom de femme moderne et facile à prononcer. Puis, lors de notre levée de fonds, on nous a fait des remarques sur le fait « qu’un nom de femme pour une entreprise c’est trop clivant » …Cela nous a tellement énervé d’avoir ce genre de remarque que c’est devenu un acte « militant » de garder Lola.

 

 

Interview menée début janvier 2023 par Nelly Brossard

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