L’assureur augmenté grâce à la data et l’IA

Découvrez mon interview réalisée par Thierry Pires en mai 2021, via l’article et et via la vidéo , comment l’assurance évolue et comment les Insurtech impactent  sa transformation, et comment l’assureur devient augmenté par le biais de la Data et de l’IA 

 

Quels sont tes principaux conseils en matière de veille ?

Personnellement, j’ai toujours été curieuse avec l’envie de comprendre le monde qui m’entoure, de m’ouvrir et d’observer avec intérêt.

De plus, j’ai aussi cette déformation professionnelle qui m’invite à garder un focus client en toutes circonstances. J’adopte volontiers la place du client dans les expériences pour mieux comprendre et imaginer des solutions pour toujours répondre à ses besoins.

Enfin, je pense qu’il est important de distinguer les tendances de fond, des tendances plus passagères.
En outre, les conseils que j’applique sur ma veille sont les suivants :

  1. Bien observer les usages des consommateurs et anticiper leurs évolutions (notamment via les nouvelles technologies).
  2. Observer aussi d’autres secteurs d’activité et dans le monde entier, pour s’ouvrir à d’autres tendances et usages.
  3. Suivre les évolutions technologiques, telles que la Data et l’IA, la réalité augmentée et la réalité virtuelle, le vocal, … Comprendre surtout comment elles vont faire bouger les usages.
  4. Observer les nouveaux entrants et identifier leurs propositions de valeur face aux acteurs plus traditionnels.
  5. Développer l’échange, le partage et l’interaction sous toutes leurs formes. Que ce soit via des rencontres physiques ou virtuelles, auprès de personnes de tous horizons pour se nourrir de bonnes idées. Cela permet d’envisager un regard différent sur les sujets. En somme, développer son réseau pour initier des conversations sur des sujets de fonds et compléter une vision commune à travers le partage des expertises.

Quelles observations actuelles nourrissent tes réflexions pour les enjeux de demain ?

J’observe actuellement beaucoup de changements dans le secteur de l’assurance :

D’une part, nous sommes dans un cycle de transformation qui révolutionne ses modèles économiques. Et dans un contexte économique marqué par la baisse des taux et une réglementation qui s’intensifie. Le secteur a des enjeux majeurs de recherche de relais de croissance et de différenciation.

D’autre part, la concurrence s’intensifie avec l’arrivée de nouveaux acteurs (GAFAM, BATX, Insurtechs…). Ils utilisent le digital et des technologies (données, intelligence artificielle, IoT, blockchain…) sur toute la chaîne de valeur. Et développent notamment des écosystèmes ouverts (les plateformes).

Enfin, de nouveaux risques liés à la technologie et des risques naturels liés aux changements climatiques sont apparus, ainsi que de nouveaux besoins et marchés.

Comment les acteurs de l’assurance (assureurs, courtiers, mutuelles…) s’organisent-ils face aux différentes mutations actuelles ? Comment développer l’assureur augmenté ?

Focus client un jour, Focus client toujours

Les consommateurs d’aujourd’hui souhaitent de la fluidité, de la simplicité et de la transparence, de la personnalisation et du temps réel. Pour répondre à ces besoins, de nouveaux modèles s’installent au sein des acteurs avec de nouveaux produits. Et des nouvelles façon d’assurer les clients se mettent en place. Les acteurs de l’assurance développent l’assurance à l’usage, l’assurance comportementale, l’assurance à la demande, ou encore l’assurance directement embarquée dans les produits et services. Par ailleurs, on observe une vraie demande de relation clients avec une relation humaine, dans le conseil et l’accompagnement.

La TransfoNum passe aussi par les nouvelles technologies

Enfin, les nouvelles technologies, permettent d’accélérer la transformation du secteur, voici quelques points clés  :

  • La Data et l’IA ont un rôle central sur toute la chaîne de valeur du secteur : au niveau de la tarification, la souscription et l’expertise, la relation client (avec le chatbot et le voicebot), pour l’analyse des données, le développement de modèles prédictifs…
  • La RPA (en anglais Robotic Process Automation, cad la robotisation automatique des processus) est très utilisée. Car elle permet de gérer les gros volumes de données et gagner en productivité, optimiser les coûts, simplifier et fiabiliser les processus et sécuriser les échanges et interactions.
  • Les objets connectés permettent de développer notamment des services préventifs (en habitation, santé, auto …) ;
  • La blockchain a de multiples cas d’usages, et notamment par exemple d’indemniser certains sinistres de façon automatique (en cas de vol, de décès ou d’intempéries notamment) ;
  • La réalité augmentée est de plus en plus utilisée à titre préventif. Par exemple pour former des personnes en cas de sinistres liés à des intempéries afin d’adopter les bons réflexes…

Si tu devais choisir une seule solution d’IA à implémenter en priorité chez un acteur traditionnel, laquelle serait-elle et pourquoi ?

En fait, chaque entreprise du secteur doit mener son propre diagnostic pour identifier les meilleures opportunités.

Toutefois, ce qui peut fonctionner à l’échelle de tout un secteur c’est d’opter pour la robotisation automatique des processus. Par exemple en commençant par quelques processus de gestion des clients et des contrats en back-office. Il s’agit de les simplifier et de les automatiser progressivement. Puis d’accompagner les équipes davantage dans la relation client et l’écoute.
Un autre usage possible est de lutter contre la fraude. Par exemple, des Insurtech proposent des outils basés sur le machine learning pour accompagner les acteurs de l’assurance dans la détection et la prévention des fraudes à l’assurance, le ROI est très rapide et les solutions éprouvées.

Qui sont les Insurtech et quelles sont leurs contributions dans le secteur de l’assurance ?

Ce sont les startup du monde de l’assurance. Elles s’appuient sur les nouvelles technologies pour développer des solutions ou des nouveaux modèles. Elles interviennent sur un segment de la chaîne de valeur  (produits, tarifs, distribution, gestion, relation client, fraude,…). Ou elle peuvent aussi intervenir sur l’ensemble de la chaîne de valeur (néo-assureur). Elles sont plus de 200 en France et ont levé plus de 216 millions d’euros en 2020 . Les insurtech, éléments clés de la transformation de l’assurance !

En France, les insurtech ont déjà eu ces dernières années, un apport indéniable sur l’ensemble de la chaîne de valeur de l’assurance.

Elles constituent réellement l’une des composantes importantes de la transformation de l’assurance et de son accélération. De plus, elles savent, sous diverses formes, mettre en œuvre une réelle coopération avec les assureurs. Et sont en ce sens très utiles pour aider les assureurs à se transformer.

Les Insurtech moteurs de la transformation de l’assurance

  1. Elles sont en grande majorité (50 % d’entre elles) focus sur le principal “pain point” côté consommateur qu’est la distribution (exemples +Simple, Luko, Assurup, Lovys…)
  2. Certaines développent des solutions pour améliorer la relation clients et permettre d’avoir des “conseillers augmentés“, grâce à la Data et l’IA : mieux comprendre les besoins du client, apporter des conseils personnalisés, identifier les différences de garanties entre les acteurs, favoriser le cross et l’up selling. Dès lors, la relation client s’en trouve améliorée  (exemples Zelros, Minalea…)
  3. D’autres développent la tarification avec des modèles de risques en temps réel et des tarifications optimisées. Cela accélère les processus de tarification de l’assurance en traitant à la fois beaucoup plus de types et de volumes de données. Et cela permet d’ajuster de manière beaucoup plus rapide les modèles de tarification et donc donne plus d’agilité (exemple Akur8)
  4. D’autres développent des solutions innovantes pour couvrir certains risques (exemple Descartes Underwriting) comme les catastrophes naturelles et les risques climatiques à partir des données météorologiques. Elles permettent une meilleure estimation du risque, l’optimisation des offres avec des tarifs plus justes, et aussi les services, avec des délais de traitement plus courts
  5. Certaines apportent de la valeur sur la détection de fraude (exemple Shift) via l’Intelligence Artificielle pour automatiser et aider les assureurs à mieux repérer les fraudes potentielles lors du traitement des sinistres et à prendre des décisions plus éclairées
  6. Enfin, sur l’indemnisation, certaines proposent des solutions de gestion des sinistres et une expertise augmentée, via l’intelligence artificielle (deep learning). Elles simplifient l’évaluation du coût d’un sinistre pour accélérer sa gestion et l’indemnisation. (exemples Weproov, BDEO…)

L’avènement des néo-assureursEt quelques insurtech en France sont des néo-assureurs « fullstack ». En effet, ils disposent de l’agrément de l’Autorité de Contrôle Prudentiel et de Résolution (ACPR).  Aujourd’hui en France, Alan, Seyna et très récemment Acheel disposent d’un agrément. Des compagnies qui maîtrisent donc la chaîne de valeur allant de la conception des produits jusqu’à leur distribution, si elles le souhaitent… C’est en effet plus aisé de disrupter en ayant cette maîtrise et cela donne plus de liberté dans les offres, les services, l’indemnisation…

Quelles sont vos missions chez Insurtech France ?

Cette initiative a été lancée en décembre 2020, il existait un réel besoin du côté des Insurtech en France. Le rôle de l’association est de répondre à ses besoins  et d’instaurer pour les insurtech un lieu d’échanges. Mais aussi de promouvoir l’excellence et la diversité des initiatives du secteur. Enfin de les accompagner et de les représenter auprès des pouvoirs publics ou du régulateur et de l’écosystème. Nous sommes 6 au sein du bureau et je suis Vice-Présidente.

Nous comptons déjà près de 120 membres après quelques mois…