Optimiser et simplifier la gestion des bénéficiaires d’assurance vie pour les professionnels de l’assurance grâce à l’Intelligence Artificielle

#Insurtech : rencontres avec ceux qui réinventent l’assurance ! Echanges avec les fondateurs et fondatrices d’Insurtech qui réinventent et transforment l’assurance sur l’ensemble de la chaîne de valeur.

C’est parti pour 10 questions à Annabelle Delestre, fondatrice de Lidix

Quels sont les points clés de votre parcours et que représente l’entrepreunariat pour vous ?

J’ai une formation pluridisciplinaire. J’ai étudié les sciences humaines (khâgne, philo) avant de faire Sciences-Po Paris en économie et finances. Cette polyvalence s’est retrouvée dans mon parcours, j’ai travaillé dans l’Asset Management et contribué à la création des premiers sites internet du secteur. On ne parlait pas encore « d’intrapreneuriat » mais c’est ce que nous faisions sans le savoir. Avant de rejoindre l’assurance-vie à La Mondiale, en marketing financier et numérique, j’ai également été administratrice d’un théâtre à la Cartoucherie de Vincennes.

J’ai toujours été passionnée par l’innovation, dans sa dimension à la fois créative et pragmatique. J’aime concevoir et réaliser des projets.

L’entrepreneuriat est devenu une évidence. Quand l’écosystème fintech a commencé à émerger, je m’y suis intéressée de très près, puis j’ai sauté le pas en 2017.

Pour mener à bien l’aventure, je me suis associée à Bruno Urvoy  avec lequel j’avais déjà réussi des projets, doté d’un talent avéré pour la communication et l’UX. En effet le secteur assurance-vie est très compliqué, voire opaque pour les néophytes et l’enjeu était de disrupter l’expérience. Quand je l’ai contacté pour le lancement de Lidix, il avait créé “En Selle Marcel”, premier concept store autour du vélo urbain premium et venait de revendre sa marque, il était donc partant !

Pour créer et diriger une entreprise, il faut déjà avoir une idée, une vision de l’évolution de son environnement et se montrer pragmatique. Nous sommes amenés à jongler entre des sujets stratégiques et l’opérationnel, le défi c’est d’avoir un impact. Transformer les idées en application, co-construire avec l’équipe et les clients est un challenge difficile.

Comment est né votre projet, comment l’idée est-elle venue ?

Trop de papiers. Compliqués à lire, à comprendre et à remplir ! 

Au départ j’étais convaincue de la nécessité de simplifier l’assurance-vie grâce à la digitalisation car le secteur était très en retard par rapport aux attentes des utilisateurs, clients et collaborateurs. Cependant le spectre était trop large (actes de gestion, optimisation financière et même indexation des polices de multiples produits…). J’ai rencontré beaucoup de prospects, constitué un « advisory board » et échangé avec des acteurs de l’écosystème. C’est ce qui m’a poussée à me concentrer sur la création d’un premier service très ciblé et commercialisable : un « MVP ».

La gestion des bénéficiaires d’assurance-vie était dans mon radar dans mes fonctions précédentes et aussi pour l’avoir vécu à titre personnel. Avec mes 7 frères et sœurs nous venions d’être bénéficiaires de notre tante Geneviève, 95 ans, il y avait plusieurs compagnies et contrats, avec des versements après 70 ans. Comme j’étais dans la partie, c’est moi qui me suis occupée « des papiers ». Et des papiers il y en a eu énormément !

L’étude de marché a confirmé le « painpoint » côté assureur et l’opportunité de créer une solution paramétrable pour automatiser les parcours bénéficiaires avec toute la dimension fiscale et réglementaire sans oublier l’UX, notre marque de fabrique.

Lidix a été sélectionné pour rejoindre la promo 2019 du Swave, la plateforme Fintech de Paris & Co à La Grande Arche de la Défense. Et nous avons quitté notre « garage » situé alors dans le quartier Montorgueil, dans la rue Tiquetonne (c’est la rue où Dumas a fait habiter son célèbre D’Artagnan).

Quelle est votre proposition de valeur ?

Lidix permet d’optimiser la gestion des bénéficiaires d’assurance vie grâce à l’IA, avec toute sa dimension fiscale et réglementaire, et en proposant une expérience ultra simple  (gestion opérationnelle et expérience utilisateur).

En développant notre solution de gestion de succession des bénéficiaires d’assurance vie, nous avons échangé avec beaucoup d’acteurs de l’innovation et du métier.

Nous avons réinventé la gestion des bénéficiaires de A à Z et décliné notre offre avec des modules spécialisés et compatibles, de la prévention jusqu’à la succession.

Les attentes des consommateurs sont très fortes et il y a un levier pour transformer une charge     (+ de 40 milliards de prestations décès par an) en opportunité avec des services qui mettent la marque assureur en valeur en prenant soin des clients.

Actuellement, notre solution phare est Lidix Procuro pour la digitalisation des successions (une fois les bénéficiaires identifiés). C’est un site en marque blanche, personnalisable aux couleurs et aux processus de l’assureur, avec une vue bénéficiaire et des vues internes pour le back-office et autres parties prenantes. Il peut être utilisé en « stand-alone » ou relié par API à l’écosystème IT du partenaire.

Quelle est votre cible de clients (BtoC, BtoB, BtoBtoC) ? Combien visez-vous de clients d’ici 3 ans ?

Notre cible est le B to B to C depuis l’origine, nous aidons les professionnels (assurance / banque / mutuelles / courtage) à mettre en place des parcours digitaux et des interfaces qui optimisent à la fois la gestion opérationnelle et l’expérience utilisateur.

En 2019 nous avons également mis en ligne un site B to C mesbénéficiaires.fr qui permet aux particuliers de mettre à jour les coordonnées des bénéficiaires de tous leurs contrats. Le service est gratuit et c’est surtout un laboratoire et une vitrine pour nos services.

Plus récemment, nous sommes sollicités sur des services purement B to B car les sujets bénéficiaires sont très régulés (Eckert, Pacte, Sapin2, Labaronne…) et les besoins d’outils pour simplifier le pilotage, la gestion et la conformité sont croissants.

Notre objectif à 3 ans est d’une vingtaine de clients assureurs en France et au Luxembourg et beaucoup plus sur les modules en selfcare.

Quel est votre « business model » ? Avez-vous fait évoluer celui-ci ?

Nous avons un abonnement mensuel (en fonction du nombre d’utilisateurs internes) et des coûts unitaires pour tenir compte des frais indirects comme la signature électronique, la vérification d’identité etc…

Et en amont, il y a une étape de set-up qui dépend des attentes des clients et de l’intégration à leur écosystème IT. Cela va d’un paramétrage très simple en 2 semaines à une personnalisation plus complexe sur plusieurs mois.

A quelle date serez-vous à l’équilibre ?

Dans la configuration actuelle, nous serions à l’équilibre en 2022, mais notre ambition est d’accélérer le développement de nos services et la R&D pour être leaders sur ce marché, d’où une levée de fonds prévue fin 2021 début 2022 et une atteinte de l’équilibre en 2023.

Quelle est votre vision de l’évolution du secteur de l’assurance ?

Le secteur est concerné par une révolution à tous les étages. Elle touche autant la tarification personnalisée grâce à l’IA que la relation client qui est bouleversée par l’omniprésence du smartphone et la montée de l’IOT (objets connectés).

C’est une véritable une révolution copernicienne car dans le secteur de l’assurance, c’est le système de gestion des contrats (« core system ») qui est le centre autour duquel tout tourne aujourd’hui. La révolution c’est que désormais tout doit tourner autour du client et des conseillers, et cela implique de revoir ses priorités. Avant Covid, il était fréquent d’entendre que la mise à niveau du « core system » était un préalable aux développements de nouveaux services en phase avec les attentes des consommateurs. La bascule digitale due à la crise sanitaire ainsi que le développement de l’ « open insurance » avec les API sont en train de changer la donne. Le chemin reste long pour les acteurs historiques – par ailleurs plutôt résilients – tandis que la concurrence s’intensifie sérieusement.

Il y a un fort enjeu pour le secteur de l’assurance et c’est un vrai paradoxe. Partout dans le monde les individus aspirent à une protection croissante et pourtant l’opinion au sujet des acteurs capables de fournir cette protection sous forme d’assurance est plus que mitigée.

Ma vision est que le secteur va être complètement bouleversé, de nouveaux acteurs émergents aussi bien du côté de la Tech que du e-commerce, et seules les marques capables de communiquer très activement avec leurs clients et qui mettront en œuvre transparence, simplicité et empathie pourront tirer leur épingle du jeu.

Une autre dimension à prendre en compte est le progrès rapide de la digitalisation du côté des services publics. C’est pourquoi chez Lidix nous avons lancé une expérimentation prometteuse avec l’Administration et l’un de nos client, assureur de premier plan.

Quelles sont les 3 principales difficultés rencontrées dans votre vie d’entrepreneur au sein de Lidix ?

  • La taille. La première difficulté consiste à commercialiser un service innovant auprès d’un grand compte. En effet avec une strat-up il ne s’agit pas d’une traditionnelle relation client – fournisseur, mais plutôt d’un partenariat d’innovation. Même si la start-up a pour atout l’agilité, la relation de départ est asymétrique.
  • Le temps. La deuxième difficulté vient de la lenteur des négociations et des circuits de décision. Beaucoup d’acteurs traditionnels peinent à oser le « test and learn », un prisme très français du rétroviseur comparé au monde anglo-saxon.
  • L’argent. La troisième difficulté concerne le financement : avant de convaincre les fonds sur les services B to B il faut prouver de la traction commerciale et donc « jongler » au démarrage.

Par ailleurs, le même plafond de verre qui freine l’ascension des femmes dans les entreprises, les freine également quand elles créent des entreprises ; les biais inconscients ont la vie dure…

3 difficultés principales rencontrées : la taille, le temps, l’argent

Quels sont selon vous les 3 facteurs clés pour la réussite de Lidix ?

  • Le premier facteur est la robustesse de nos parcours digitaux. Nos modules croisent 3 approches, la clé de notre savoir-faire :
    • L’expérience utilisateur optimisée (avec des chemins « data-driven »),
    • L’expertise métier (assurance-vie, fiscalité, conformité),
    • La solidité technique (stabilité, sécurité, interopérabilité).
  • Le second est la multiplication des clients qui choisissent la plateforme  – Cette croissance permet d’augmenter la valeur ajoutée de nos solutions (profondeur des fonctionnalités, IA) tout en restant compétitif.
  • Le dernier est un développement de l’équipe en harmonie avec notre ADN. Nous voulons cultiver la synthèse entre l’UX et l’excellence opérationnelle. Pour cela nous sommes fédérés autour de valeurs fortes : innovation, transmission et inclusion.

3 facteurs clés de réussite : la robustesse de nos parcours digitaux, la multiplication des clients, le développement de l’équipe selon notre ADN

Et si c’était à refaire ?

Tout pareil ! Avec une internalisation plus précoce de l’IT.

 

Et en bonus …

Racontez-moi une anecdote amusante en lien avec Lidix ?

Il est rapidement apparu crucial de trouver un CTO pour Lidix, en vue d’internaliser notre technologie. Ce n’est pas une mince affaire. Or, l’an dernier, nous avons été mis en relation avec Jean-François pour une mission ponctuelle de développeur front. Non seulement le courant est bien passé entre nous, mais nous avons découvert qu’il avait tout un passé dans le logiciel financier… Il avait pris du recul par rapport au salariat, mais il a eu envie de monter dans un bateau où règne convivialité, exigence et bienveillance.

Pourquoi avoir choisi ce nom pour votre insurtech ?

Lidix est un acronyme de Life Insurance Digital eXperience. Pour le lancement, c’était important de faire le lien entre le secteur d’activité, l’UX qui est au cœur de notre approche et l’international. Baptiser un produit, c’est déjà commencer à le faire exister.

 

Interview menée début juillet 2021 par Nelly Brossard

 

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